La fusion des académies, c’est pour 2021 !

mardi 26 juin 2018
par  sudeducationalsace
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Commandé par JM Blanquer, le rapport de l’IGAENR remis au ministre en mars 2018 et publié dès mai préconise de « franchir une nouvelle étape dans la réorganisation territoriales des services déconcentrées. » Deux ans seulement après la création des 13 « régions académiques » par le décret du 10 décembre 2015, les rapporteurs F. Weil, conseiller d’État et ancien recteur de Paris, O. Dugrip, recteur d’Aquitaine et les inspecteurs généraux MP. Luigi et A. Perritaz, s’empressent de démonter l’inefficience des 13 « régions académiques » afin de présenter la régionalisation comme incontournable.

La première scène de ce nouvel acte débute en novembre 2017, avec la nomination d’un recteur unique à la tête des académies de Caen et Rouen.

Cinq mois après le lancement de cette expérimentation, les rapporteurs préconisent d’ores et déjà une nouvelle feuille de route :

  • rentrée 2018 : désignation de treize recteurs de région académique « chargés de préparer, selon les modalités de leur choix et en respectant un dialogue social fort, les projets de fusions des académies de leur région » à remettre au ministère pour 2019 ; transfert de toutes les compétences relatives à l’enseignement supérieur aux recteur de régions académiques, notamment pour permettre la mise en place de la loi ORE ;
  • rentrée 2019 : fusion des académies de Dijon et Besançon (Bourgogne‐Franche‐Comté) ; Lille et Amiens (Hauts‐de‐France) ; Caen et Rouen (Normandie) ; Aix-Marseille et Nice (Provence‐Alpes‐Côte d’Azur).
  • Rentrée 2020 : fusion des académies de Lyon, Grenoble, Clermont (Auvergne-Rhône-Alpes) ; Montpellier, Toulouse (Occitanie) Bordeaux, Poitiers, Limoges (Nouvelle-Aquitaine) ; Nancy-Metz, Strasbourg et Reims (Grand Est)
  • Rentrée 2021 : fusion des académies d’Île-de-France, alignée sur le Grand-Paris.

Les premiers agents à subir cette réforme seront les personnels des services académiques et départementaux, notamment parce que les rapporteurs préconisent de mettre en cohérence les sièges des futures académies avec les sièges des préfectures de région. Les services effectuant des missions qualifiées de « gestion de masse » (statistiques et programmation, examens et concours, gestion des carrières...) devront être mutualisés puisqu’ils ne nécessiteraient pas de « proximité particulière ». De quels moyens bénéficieront les personnels administratifs et techniques pour pouvoir gérer un nombre plus important d’élèves, d’agents et d’établissements ? Elles et ils devront « monter en compétence. »

Et les profs ?

Les enseignant-es ne seront pas en reste même si, plus prudent, les rapporteurs conseillent « dans un premier temps, de ne pas remettre en question les circonscriptions académiques actuelles pour l’affectation des personnels ». Mais à terme c’est « une totale régionalisation des personnels » qui est visée, l’objectif principale de la réforme restant de réaliser des économies en changeant d’échelle la gestion des personnels. Des recrutements interacadémique, voir interministériels, de contractuels et de titulaires sont déjà en place.

Quand à la logique d’individualisation des carrières et des rémunérations, elle pourra désormais s’appuyer sur un budget régional unique, chaque académie étant désormais libre d’effectuer ses choix. Sous prétexte d’adaptation aux spécificités territoriales, c’est une remise en cause des garanties statutaires. Il s’agit finalement d’appliquer l’inversion de la hiérarchie des normes, principe au cœur des lois Travail, à la fonction publique.


UNE FUSION QUI N’EST PAS UNE PREMIÈRE...
Les expériences précédentes de fusion de services déconcentrés dans autres ministères, comme celle des DIRECCTE ou des ARS en 2016, laissent envisager le pire puisqu’elles se sont traduites par :

  • la dissolution brutale et inattendue de services entiers
  • le débarquements d’agents de leur poste, de mises au placard, de déclassements ou rétrogradations
  • la centralisation dans les capitales régionale de la quasi-totalité des services de décision
  • l’appauvrissement et la perte de sens liés au morcellement du travail
  • la pertes de primes et l’augmentation de la part des primes de performances dans la rémunération
  • des inégalités de traitement entre agents
  • la dégradation des conditions de travail et multiplication des hiérarchies intermédiaires
  • une tendance à l’individualisation des évaluations.

Cette nouvelle territorialisation doit également être abordée en lien avec les orientations définies par le gouvernement pour le secteur public (précarisation des emplois, remise en cause du paritarisme, primes au mérite, mobilité accrue...), pour l’Éducation nationale (réformes du baccalauréat, des lycées professionnels et de la formation continue) et l’enseignement supérieur (loi ORE). Au delà de la gestion des moyens humains et financiers, elle a également vocation à être un outil de pilotage pédagogique en fusionnant les corps d’encadrement pour contrôler et diriger davantage le travail dans la classe.

Une nouvelle fois, c’est l’indigeste recette gouvernementale du « dialogue social en marche forcée » qui s’applique. Aucune information sur les options étudiées n’ont été communiquées aux personnels ou aux syndicats, ces derniers ayant même été débarqués des groupes de travail. « L’administration travaille. » Les personnels cependant ne s’y trompent pas et se mobilisent déjà dans plusieurs académies (Nancy-Metz, Caen, Limoges, Nice, Amiens...) pour affirmer leur refus du principe de la fusion.

Pour plus d’information : lire le rapport


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