Leur société n’est pas la nôtre !

jeudi 8 janvier 2009
par  sudeducationalsace
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« L’échec des IUFM est essentiellement dû à l’idéologie véhiculée par les penseurs des sciences de l’éducation (Meirieu, Bourdieu, etc.) prônant un enseignement plus démocratique, diffusant moins de savoir et plus de pédagogisme. » Ainsi s’exprimait l’IFRAP le 2 juin 2008, dans un article intitulé « Enseignement : enfin la fin des IUFM ». L’IFRAP, Institut Français pour la Recherche sur les Administrations et les Politiques Publiques se présente comme l’un des premiers laboratoires d’idées privés français, tant par son ancienneté (1985) que par son rayonnement.

  

Un enseignement plus démocratique, voilà donc l’ennemi pour ces penseurs « apolitiques ». Nous ne devons pas l’oublier dans nos prises de position et dans nos luttes, sauf à passer à côté de l’essentiel pour ne combattre que le secondaire.


Ainsi, la volonté gouvernementale de « faire des économies » n’explique pas l’ensemble des « réformes » en cours. Si les suppressions de postes entrent dans ce cadre, si la disparition des enseignants-stagiaires peut y trouver pour partie son explication, il n’en va pas de même des modifications de programmes du primaire ou de la suppression des Bep en lycée professionnel. Dans ce dernier cas, il s’agit de créer deux filières socialement discriminantes (CAP / Bac Pro en 3 ans) bien plus que de faire des économies.


De même, prétendre que le gouvernement veut « faire baisser le niveau », voire « détruire le savoir », est une absurdité. Hormis quelques dictatures mystiques, aucun gouvernement ne peut vouloir affaiblir intellectuellement son pays. Ce qui est en question aujourd’hui, c’est la distribution du savoir, non son niveau. Un savoir très élevé pour quelques-uns, ceux dont les parents dès l’école primaire ont eu les moyens de choisir le « bon » soutien, la « bonne » filière et le « bon » établissement, fin de la carte scolaire oblige ; un savoir minimum pour les autres, futurs exploités réduits aux contrats limités, aux temps partiels imposés et aux emplois déclassés.


Ceux-là n’auraient alors à s’en prendre qu’à eux-mêmes — à leur paresse ou leur manque d’ambition — ou, variante socio-biologique, à la fatalité de l’absence de « don », à moins qu’il ne s’agisse de leur tendance innée à la délinquance « détectable dès trois ans ». C’est d’abord pour former les futurs citoyens à cette société radicalement inégalitaire que, de réformes en réformes, le paradigme libéral est appliqué au champ scolaire.


Cette contre-révolution culturelle n’épargne pas les travailleurs de l’éducation. Chargés d’en transmettre les valeurs, ils ne pourront le faire efficacement qu’en y étant eux-mêmes soumis. Le développement des évaluations par objectifs, des postes à profils, des projets « innovants », ainsi que l’éclatement des statuts, constituent autant d’outils à la disposition des chefs d’établissement pour inculquer à “leurs” personnels une logique managériale qui transforme l’éducation en marchandise parmi d’autres.


Le combat qui s’engage ne se réduit donc pas à une lutte catégorielle des personnels ou à une lutte idéologique entre « pédagogues ». Il a pour enjeu un choix de société : celle du « laisser-faire » des spéculateurs, pour les faillites desquels les caisses de l’État sont toujours pleines, ou celle du vivre-ensemble des travailleurs solidaires. Seule la constitution, autour de la question de l’école, d’un véritable front impliquant l’ensemble des travailleurs, à côté des élèves et des parents, pourra durablement faire échec aux plans de ce gouvernement. C’est l’émergence d’un tel front, avec sa capacité à cristalliser les luttes issues de tous les secteurs sociaux, qui a déjà commencé à faire reculer le pouvoir.

Au moment où nous écrivons, grâce à la mobilisation des lycéens, la réforme de la classe de 2nde est repoussée d’un an. Les jeunes marquent un point et ouvrent la voie de la lutte aux salariés. En appelant à manifester partout en France, samedi 17 janvier, avec les organisations signataires de l’appel « L’éducation est notre avenir », et en se joignant à la journée unitaire de grève du jeudi 29 janvier « pour la défense de l’emploi, des salaires et du service public », Sud éducation entend bien amplifier le mouvement.

Seules nos luttes transformeront le recul du gouvernement en avancées concrètes pour une autre école : une école démocratique, dans une société réellement solidaire.


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